La peur d’une peur

Que dire ?

Dans ce moment de suspension, où le corps est contraint à rester à distance – pour combien de temps ? -, difficile à la fois de ne pas prendre en compte ce qui se passe et de dire quelque chose sur ce qui se passe.

Aussi, le recours à Freud et à Lacan s’avère plus que jamais une chance pour s’éclairer d’un questionnement.

Comment situer actuellement la question de l’angoisse qui n’est pas sans objet ?

Dans « La Troisième », Lacan la distingue justement de la peur : « L’angoisse (…) se situe ailleurs que la peur dans notre corps, dit-il.

C’est le sentiment qui surgit de ce soupçon qui nous vient de nous réduire à notre corps. Il est très curieux que la débilité du parlêtre ait réussi à aller jusque-là – jusqu’à s’apercevoir que l’angoisse n’est pas la peur de quoi que ce soit dont le corps puisse se motiver. C’est une peur de la peur. »[1]

La distinction est cruciale. La peur, en tant que son objet peut se nommer et se partager, est collectivisable.

L’angoisse, elle, est propre à chaque sujet : elle n’est pas sans objet, l’objet petit a, cause du désir, radicalement séparé de tous les autres objets nommables.

Ainsi confronte-t-elle à l’impossible à dire. C’est là la valeur irremplaçable de l’invention du discours analytique que d’accueillir cet impossible.

Références

Références
1 . Lacan J., « La Troisième », La Cause freudienne n° 79, p. 29.

Hervé Damase

Psychanalyste, membre de l'ECF