« La psychanalyse d’orientation lacanienne prétend que l’émergence d’un désir sexuel dans le corps d’un sujet a un effet structurel d’altérité traumatique, qu’un abus ait eu lieu ou pas dans la réalité. »[1]
Le 4 juin dernier, lors de la conversation-zoom autour des quatre arguments des J50 de l’ECF[2], la distinction entre l’Attentat Sexuel de structure et l’Attentat Sexuel dans la réalité a particulièrement résonné pour moi.
Il a été rappelé que pour la psychanalyse, un « premier » attentat est « de structure. » « Freud emploie le mot d’attentat pour nommer la violence et la déflagration de ce qui vient s’inscrire dans le corps du sujet confronté à l’irruption du sexuel comme rencontre traumatique. »[3] C’est un trauma qui concerne « tout sujet qui vient au monde »[4]. La rencontre avec le désir sexuel de l’autre fait apparaitre sa jouissance, place le sujet en position d’objet et laisse des traces sur le corps. Dans ce moment « mythique »[5] , le sujet a la possibilité d’inventer sa propre réponse, sous forme de fiction dont l’amour est un des noms. « L’utilité fondamentale du fantasme »[6] en réponse à l’attentat a ainsi été soulignée.
Mais parfois, un attentat dans la réalité est révélé comme dans le livre Le consentement [7] de Vanessa Springora. « Le sujet est alors confronté à l’horreur de n’être qu’un pur objet de jouissance pour l’autre sans l’appui du fantasme », il est « nu de fictions. »[8] Le trauma de structure est redoublé. Cette « dimension » d’attentat, du côté de la mauvaise rencontre, de la contingence et de « la pulsion pure »[9] ne permet pas l’invention d’une solution fantasmatique.
S’il y a, un point d’intersection entre ces deux dimensions d’attentats, l’une ne doit pas recouvrir l’autre. Il ne s’agit pas de « tout mettre dans le sac du trauma de la rencontre sexuelle »[10]ni à l’inverse « de ramener l’effraction structurelle du côté de l’abus, dans un refus de la violence intrinsèque du signifiant sur le corps et une confusion avec ce qui se produit dans la réalité »[11].
C’est dans la cure que la vérité du sujet peut se dire. « Il n’y a pas d’indice de réalité dans ce qu’un sujet raconte »[12] mais sa propre vérité. Seul le sujet en analyse peut dire ce qui a fait attentat pour lui, opérer un nouage des différents abus qu’il a subis, et sous transfert, reconstruire le fantasme de l’amour…
Ça ne se généralise pas, c’est toujours au singulier et c’est par la singularité des cas que la psychanalyse apporte un savoir inédit et une réponse aux grands thèmes dits de société comme celui « des violences faites aux femmes ».
Références
1 | Arguments des J50, PART. 4 par Caroline Leduc, https://www.attentatsexuel.com/les-quatre-arguments/ |
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2 | Les 14 et 15 novembre 2020 à Paris. |
3 | Arguments des J50, PART. 1 par Laurent Dupont. |
4 | Angèle Terrier lors de la discussion. |
5 | Caroline Leduc lors de la discussion. |
6 | Laurent Dupont lors de la discussion. |
7 | Springora V., Le consentement, Paris, Grasset, 2020. |
8 | Caroline Leduc lors de la discussion. |
9 | Éric Zuliani lors de la discussion. |
10 | Angèle Terrier lors de la discussion. |
11 | Caroline Leduc lors de la discussion en référence aux mouvements féministes et MeToo. |
12 | Éric Zuliani lors de la discussion citant Freud. |