La nouvelle saison de l’atelier de lecture d’Aurillac « Tous exilés ! » a débuté par l’exposé de Monique Hermant sous le titre « De l’exil à la langue ».
Notre collègue est intervenue à partir de sa lecture de deux articles, l’un de Philippe Lacadée, « De l’exil à vivre entre les langues[1] », l’autre de Philippe La Sagna, « Exil et migration[2] », ainsi que du livre, Penser entre les langues[3] de Heinz Wismann.
Pour les participants, elle a développé le point essentiel de ses lectures : l’exil inaugural, fondamental du sujet est l’essence de la condition humaine. Il peut être considéré comme un renoncement, une séparation définitive de sa lalangue, tour de Babel à jamais perdue, pour accéder à sa condition.
Mais l’exil c’est aussi, nous dit-elle, le traumatisme de celui qui quitte son pays, sa langue et se retrouve « entre deux langues » pour se faire poète, écrivain ou cinéaste. Le vide de la perte initiale, exil intérieur, peut ainsi être bordé par une création qui vient comme une suppléance, une sublimation. L’exil devient alors fécond.
M. Hermant a illustré son propos de nombreux exemples et je ne résiste pas à citer celui-ci, début du poème d’Aimé Césaire « Calendrier lagunaire », dans le recueil : Moi, laminaire…[4]
J’habite une blessure sacrée
J’habite des ancêtres imaginaires
J’habite un vouloir obscur
J’habite un long silence
[…]
À vrai dire je ne sais plus mon adresse exacte.
Bathyale ou abyssale
J’habite le trou des poulpes
Je me bats avec un poulpe pour le trou de poulpe.
Dominique Legrand
* Soirée du mercredi 24 octobre 2025.
[1] Lacadée P., « De l’exil à vivre entre les langues », Pari de Conversation du 22 juin 2022, publication en ligne, https://pariconversation.wixsite.com/paridelaconversation/post/de-l-exil-%C3%A0-vivre-entre-les-langues-philippe-lacad%C3%A9e
[2] La Sagna P., « Exil et migration », Ironik !, n°46, avril 2021, publication en ligne,
https://www.lacan-universite.fr/wp-content/uploads/2021/04/ironik-46-Une_VD.pdf
[3] Wismann H., Penser entre les langues, Paris, Albin Michel, 2012.
[4] Césaire A., Moi, laminaire…, Seuil, 1991.
