Valentine Dechambre a rencontré Claudine Valette-Damase, déléguée aux cartels.
Valentine Dechambre : Le cartel est une invention de Lacan pour son École. Peux-tu nous présenter ce dispositif en quelques mots, selon l’expérience que tu en as?
Claudine Valette-Damase : Ta question résonne ainsi : pourquoi des multiples expériences du cartel, j’ai gardé un souvenir précieux de chacun d’eux, parfois ce n’est qu’un détail, un signifiant qui reste, à chaque nouveau cartel, une nouvelle expérience donc!
Je m’autorise de cette longue expérience pour dire l’inédit de ce dispositif de parole minimaliste et pourtant si efficace : quatre se choisissent qui choisissent le plus-un dont la fonction veille à rendre possible l’élucidation de chaqueun. La prise de parole dans le cartel provoque un changement de discours obligeant chacun à quitter le savoir du maître, le savoir universitaire pour l’aborder de manière radicalement différente.
L’invention du cartel par Lacan fait partie intégrante de la création de son École de psychanalyse qu’il conçoit comme École de formation des analystes éloignée de toute hiérarchie. Il est, en effet, primordial de ne jamais oublier que la première formalisation du cartel par Lacan est une de ses réponses à ce moment d’arrachement pour lui qu’est son excommunication de l’IPA et l’entrée dans le deuxième temps de son enseignement avec Le Séminaire xi Les quatre concepts fondamentaux de la psychanalyse.
Valentine Dechambre : Dans l’argument de la Journée Question d’École qui se tient à Paris le 1 er février, sous le titre « Puissance de la parole », une question porte sur « l’usage de la parole » dans le cartel. Comment cela résonne-t-il pour toi ?
Claudine Valette-Damase : L’argument est un véritable souffle dans ce monde déboussolé, désorienté où la ségrégation fait, chaque jour, des ravages. Au moment de te répondre, je retiens comme l’élément central de l’argument concernant le cartel : « le mouvement des corps et la puissance de la parole » dans la formation de l’analyste. La psychanalyse n’est pas une science mais elle doit en avoir la rigueur. Elle est avant tout une pratique de parole en présence des corps de l’analysant et de l’analyste que Freud puis Lacan n’ont eu de cesse de conceptualiser afin d’en assurer la transmission.
La présence des corps portant la voix du dire de chaque-un, c’est la subversion même. À l’heure de l’Autre qui n’existe pas, le cartel est le pari d’un collectif dans lequel la subjectivité tient les rênes.
Valentine Dechambre : Quel message souhaiterais-tu adresser aux lecteurs du Courrier qui hésiteraient encore à se mettre en cartel ?
Claudine Valette-Damase : Se mettre en cartel pour travailler une impasse, un point énigmatique, une perplexité, une mise en question, l’actualité de son interrogation va ouvrir la voie au futur cartellisant à une aventure, un voyage à nul autre pareil dans le monde de la psychanalyse à travers les enseignements de Sigmund Freud, de Jacques Lacan, de Jacques-Alain Miller et de quelques autres…
À partir de la solitude propre à chacun que l’expérience analytique révèle à celui qui y consent, le travail du cartel maintient ouverte la question de l’inconscient.
Pour toute demande relative aux Cartels, vous pouvez vous adresser à : Claudine Valette-Damase, déléguée aux cartels pour l’ACF MC – claudine.valette07@wanadoo.fr