Extrait du Séminaire XV L’Acte psychanalytique

© Aurélie Boissinot

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Ce passage du Séminaire de Jacques Lacan, L’Acte psychanalytique, est un extrait du chapitre VII, « L’acte et le faire », intitulé ainsi par Jacques-Alain Miller qui en a établi le texte. Cette partie sera présentée lors de la soirée d’étude du 13 janvier 2025, sous la responsabilité de Jean-Robert Rabanel.

La béance qui reste toujours entre l’acte et le faire, c’est de cela qu’il s’agit. C’est là qu’est le point vif autour de quoi on se casse la tête depuis un certain nombre, en fait très réduit, de siècles. Songez au peu d’arrière-arrière-grands-pères qu’il faudrait pour être tout de suite à l’époque de César. Vous ne vous rendez pas compte à quel point vous êtes impliqués dans des choses que seuls les manuels d’histoire vous font croire être du passé.

On se casse la tête – voyez Hegel – avec la différence du maître et de l’esclave. Vous pouvez donner à cela tout le sens élastique que vous voulez, si vous y regardez de bien près, il ne s’agit de rien d’autre que de la différence entre l’acte et le faire. Nous essayons de lui donner un autre corps un peu moins simple que le sujet qui pose l’acte. Ce n’est pas du tout forcément et uniquement le sujet qui commande. C’est cela précisément qui est troublant.

Pierre Janet a fait toute une psychologie autour de ça. Ça ne veut pas dire qu’il était mal orienté, au contraire, seulement ses analyses sont assez rudimentaires et ne permettent pas de comprendre grand-chose. Il dit qu’il y a ceux qui font faire, et c’est un fait qu’on trouve représenté sur les bas-reliefs égyptiens un pilote, aussi bien d’ailleurs qu’il y a un chef d’orchestre à Pleyel ou ailleurs – ça n’explique pas grand-chose. Là où il y a vraiment du maître, ça ne veut pas tellement dire qu’il se les roule, comme on croit. Il y a ceux qui ont affaire avec l’acte et ceux qui ont affaire avec le faire. Mais il y a un faire et un faire. C’est là qu’on peut commencer de comprendre comment, malgré son caractère de futilité, le faire de la psychanalyse a peut-être plus de chances qu’un autre de nous permettre l’accès à la jouissance.

Ce faire, je voudrais en souligner un trait. Que c’est un faire de pure parole, je me tue à le rappeler depuis toujours, pour essayer de situer sa fonction dans le champ de la parole et du langage. Mais ce qu’on n’aperçoit pas, c’est que ce faire-là, par rapport à ce qui est du faire commun, se rapproche de l’acte, parce que, précisément, c’est un faire de pure parole. On pourrait aussi bien le traduire par le signifiant en acte. Il s’agit justement que le sujet s’en absente, jusqu’à un point aussi avancé qu’il le peut [1].

Références

Références
1 Lacan J., Le Séminaire, livre XV, L’Acte psychanalytique, texte établi par J.-A. Miller, Paris, Seuil / Le Champ freudien, 2024, p. 137.

Jacques Lacan